Kinshasa, 26 Décembre 2024-Dans une correspondance adressée au président de la République, M. Musaka Bahati Patient, propriétaire d’une concession privée (jadis succession Mama Mobutu), dénonce une tentative de réinstallation illégale de la société Best Building Company SARLU sur ses terres. Cette manœuvre serait soutenue par le ministre de la Justice, Constant Mutamba, et la ministre des Affaires sociales, Aziza Munana. Ces accusations mettent en lumière de graves violations de la Constitution et des décisions judiciaires en vigueur, plongeant cette affaire dans une controverse nationale.
Les faits : une procédure judiciaire ignorée
L’affaire remonte à une vente légitime conclue entre M. Musaka et la succession Mama Mobutu, représentée par Mme Ngombo Toku Mobutu, désignée liquidatrice légale de ce patrimoine familial. Ce transfert de propriété, appuyé par des documents officiels et des jugements rendus en bonne et due forme, a été contesté à maintes reprises, notamment par des institutions publiques. La propriété, autrefois sous administration étatique à l’époque de l’AFDL, avait pourtant été restituée légalement à la famille Mobutu par un arrêté ministériel en 2006.
Malgré une décision du Tribunal de Grande Instance de Kinshasa/Kalamu en 2022 ordonnant le déguerpissement de la RDC et de tout occupant illégal, la situation reste tendue. L’exécution de cette décision, assortie d’une clause exécutoire, est entravée par des actions jugées abusives de certains membres du gouvernement. En effet, un contrat de bail a été signé entre le ministère des Affaires sociales et Best Building Company, bien que cette parcelle appartienne légalement à M. Musaka, selon le certificat d’enregistrement Vol. AKN 21, Folio 10.
Accusations d’ingérence et non-respect des lois
Le comportement des ministres Mutamba et Munana est dénoncé comme un abus de pouvoir, une violation flagrante de l’article 149 de la Constitution qui consacre la séparation des pouvoirs. Leur descente sur la parcelle en compagnie des parties condamnées a été perçue comme une tentative d’influencer les procédures judiciaires en cours, au mépris des lois établies et des droits du propriétaire.
Les avocats de M. Musaka rappellent que la Fondation Mama Mobutu, d’où provient cette parcelle, a été transformée en entité autonome dès 1989. Ainsi, tous les biens de cette fondation appartiennent exclusivement aux héritiers de Mama Mobutu, comme confirmé par plusieurs dispositions légales et judiciaires. L’État congolais, en revanche, n’a aucun droit légitime sur ces propriétés.
En dépit des jugements en faveur de M. Musaka, les ministres accusés auraient utilisé leur influence pour contourner la loi. Leur rôle actif dans la réinstallation de Best Building Company sur la parcelle a été facilité par l’usage de la force publique, avec le remplacement des agents de sécurité du propriétaire par des policiers affectés à la protection des travaux illégaux entrepris par l’entreprise libanaise.
Ces agissements sont également en contradiction avec la mission régalienne de l’État, qui consiste à garantir la protection des citoyens et de leurs biens, conformément à l’article 34 de la Constitution. Le soutien manifeste des ministres à une entreprise condamnée en justice est perçu comme une atteinte à l’autorité des décisions judiciaires rendues au nom du peuple.
La correspondance du plaignant rappelle que cette affaire est encore pendante devant la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe et d’autres juridictions compétentes. Aucune nouvelle décision n’autorise une réinstallation ou une occupation de la parcelle, rendant les actions des ministres illégales et contraires à l’état de droit prôné par le chef de l’État.
Par ailleurs, l’annulation du contrat de bail signé avec Best Building Company par le Tribunal de Grande Instance de Kinshasa/Kalamu en 2024 confirme le caractère frauduleux de cet accord. La justice a estimé que ce contrat était nul et de nul effet, étant donné qu’il a été conclu en violation des règles de droit et sur une propriété privée protégée.
Un appel au président de la République
Face à cette situation, M. Musaka Bahati Patient appelle le président de la République Félix Tshisekedi, à rappeler à l’ordre les ministres concernés. Il exhorte également à un respect strict des lois en vigueur et des décisions judiciaires rendues, afin de garantir la justice et de préserver la crédibilité des institutions de la République.
Cette affaire soulève des questions plus larges sur l’ingérence des autorités politiques dans des litiges civils et judiciaires. Elle met également en lumière les défis persistants dans la lutte pour l’instauration d’un véritable état de droit en République démocratique du Congo.
Enfin, les agissements dénoncés par M. Musaka soulignent la nécessité d’un contrôle rigoureux des actes posés par les membres du gouvernement. Dans une République démocratique, aucun citoyen ne devrait être victime de violations flagrantes de ses droits de propriété, surtout lorsqu’ils sont protégés par des décisions judiciaires incontestées.