Kinshasa, 09 février 2025- Le sommet conjoint de la SADC et de l’EAC, tenu samedi en Tanzanie, a pris une décision qui ne fait pas l’unanimité en RDC. Contre la volonté du gouvernement congolais, les dirigeants régionaux ont ordonné la fusion des processus de paix de Luanda et de Nairobi en un seul cadre de négociation. Cette nouvelle approche ouvre la voie à un dialogue direct entre Kinshasa et la rébellion du M23, une option que les autorités congolaises ont toujours rejetée.
Alors que la RDC attendait une condamnation ferme des violations de son territoire par le Rwanda, le sommet s’est gardé de pointer du doigt Kigali. Aucune exigence de retrait immédiat des troupes rwandaises n’a été formulée. À la place, les chefs d’État ont opté pour un renforcement des mécanismes de paix existants, en confiant la gestion du processus fusionné aux co-présidents João Lourenço et Uhuru Kenyatta, en consultation avec l’Union africaine.
Dans cette optique, les dirigeants de la région ont annoncé la nomination de nouveaux facilitateurs issus d’autres régions d’Afrique. L’objectif affiché est d’élargir l’assise diplomatique des négociations et d’apporter une nouvelle dynamique au processus de paix. Mais pour Kinshasa, cette décision pourrait être perçue comme une tentative d’imposer un dialogue avec une rébellion soutenue par un pays voisin.
“Le sommet conjoint a ordonné la reprise des négociations directes et du dialogue avec toutes les parties étatiques et non étatiques (militaires et non militaires), y compris le M23 et dans le cadre du processus de Luanda/Nairobi”, peut-on lire dans la déclaration finale. Une annonce qui ne manquera pas de susciter des réactions au sein du gouvernement congolais, qui s’est toujours opposé à toute discussion directe avec le M23.
Par ailleurs, le sommet n’a pas exigé le retrait immédiat des rebelles et des troupes rwandaises du territoire congolais. Il a seulement ordonné l’élaboration de « modalités de retrait des forces armées étrangères non invitées », sans préciser de calendrier ni de contraintes claires. Une ambiguïté qui pourrait jouer en faveur du M23, lequel continue d’occuper de vastes pans du Nord-Kivu.
Sur le plan diplomatique, cette décision met la RDC dans une position délicate. Alors que Kinshasa espérait une condamnation ferme de l’agression dont elle se dit victime, elle se retrouve face à une injonction de dialogue avec ceux qu’elle considère comme des envahisseurs. Le gouvernement pourrait être contraint de revoir sa stratégie pour ne pas s’aliéner le soutien des organisations régionales.
Malgré ces tensions, la SADC et l’EAC ont tenu à réaffirmer leur engagement aux côtés de la RDC. Elles ont exprimé leur solidarité et leur volonté d’aider le pays à préserver son indépendance, sa souveraineté et son intégrité territoriale. Mais dans les faits, la décision de fusionner les processus de paix pourrait être perçue comme une victoire diplomatique pour le Rwanda et le M23.
Reste à voir quelle sera la réaction officielle de Kinshasa face à cette nouvelle orientation imposée par ses partenaires régionaux. Acceptera-t-elle de se plier à ce dialogue ou cherchera-t-elle à contourner cette décision ? Une chose est certaine : la crise sécuritaire dans l’Est de la RDC vient d’entrer dans une nouvelle phase aux implications encore incertaines.