Kinshasa, 27 mai 2025- La déclaration musclée de Constant Mutamba, ministre d’État en charge de la Justice, contre le procureur général près la Cour de cassation, continue de diviser l’opinion.
Si certains y voient un cri d’innocence face à des accusations jugées infondées, d’autres dénoncent une posture arrogante et dangereuse pour l’équilibre des institutions. La sortie publique du ministre soulève une question de fond. Jusqu’où un membre du gouvernement peut-il aller dans sa riposte sans compromettre la séparation des pouvoirs ?
Jean-Claude Katende, président de l’ASADHO, n’a pas caché son inquiétude face à cette prise de parole inhabituelle. “Pourquoi le ministre Constant Mutamba s’est exprimé de cette manière en public contre le procureur général ? a-t-il eu l’autorisation du président de la République ou de la Première ministre ? Qu’il ait eu l’autorisation ou pas, un homme d’État ne peut pas défier une autre institution de cette manière”, a-t-il affirmé. Pour ce défenseur des droits humains, le spectacle offert est loin d’être républicain.
Constant Mutamba, rentré récemment à Kinshasa, a immédiatement contre-attaqué. Devant les cadres de son ministère, il a lancé : “Ils ont dit que j’ai fui à partir de la Tanzanie, je suis venu les affronter. Dites au procureur que je n’ai pas peur de la prison, je suis prêt.” Le ministre ne reconnaît aucune légitimité à Firmin Mvonde pour instruire son dossier et l’accuse, à son tour, d’irrégularités. “Quelqu’un qui fait l’objet d’enquêtes ne peut pas initier une action contre le ministre”, a-t-il ajouté.
Pendant que les tensions verbales s’enflamment, le Parlement devient l’arbitre institutionnel de cette crise. Deux commissions ont été chargées d’examiner le réquisitoire de Firmin Mvonde, qui accuse Mutamba d’un détournement de 39 millions USD destinés à la construction de prisons. Leur rapport est attendu ce mercredi 28 mai, dans une plénière sous haute tension, où pourrait se jouer l’avenir politique du ministre.
Au-delà de l’affrontement entre deux hommes, cette affaire interroge sur le fonctionnement de l’État de droit en RDC. Les lignes entre les pouvoirs semblent de plus en plus floues, et les règlements de comptes publics menacent de décrédibiliser les institutions.