Kinshasa, 10 juin 2025- Alors que Goma est toujours sous le contrôle des rebelles du M23, le vice-Premier ministre chargé des Transports, Jean-Pierre Bemba, a jeté un pavé dans la mare politique lundi. Au micro de Top Congo FM, il a frontalement mis en cause l’ancien président Joseph Kabila, l’accusant d’avoir délibérément infiltré les Forces armées de la RDC (FARDC) avec des combattants étrangers.
“Joseph Kabila est un imposteur dont le rôle en RDC a été notamment d’infiltrer l’armée pour la désarticuler. Les attaques du CNDP et du M23 n’avaient pour but que de permettre l’intégration de Rwandais comme soldats dans les FARDC”, a-t-il déclaré. Il estime que cette stratégie aurait permis de financer, indirectement, la machine de guerre du Rwanda à hauteur de 66 millions de dollars mensuels durant près de deux décennies.
Le CNDP (Congrès national pour la défense du peuple), créé en 2006 sous la direction du général Laurent Nkunda, a été selon Bemba l’instrument initial de cette infiltration. Présenté à l’époque comme un mouvement visant à protéger les Congolais tutsi, le CNDP s’est rapidement imposé comme une force rebelle puissante, accusée de graves exactions, et largement soutenue par Kigali. Son intégration dans l’armée en 2009, après les accords de Goma, avait déjà suscité des doutes sur la véritable volonté du régime Kabila de restaurer la paix.
Bemba reproche à l’ancien président d’avoir utilisé le CNDP comme une force de déstabilisation interne tout en prétendant pacifier l’est du pays. Selon lui, cette intégration, loin de renforcer les FARDC, les aurait rendues vulnérables, et aurait permis à Kigali de contrôler indirectement certaines unités militaires congolaises. Les conséquences de cette politique se font encore sentir aujourd’hui avec la résurgence du M23.
La présence actuelle de Joseph Kabila à Goma, dans une ville sous menace rebelle, est perçue comme une provocation par certains cadres du pouvoir. Elle suscite également une profonde inquiétude dans l’opinion publique, déjà traumatisée par les alliances troubles du passé. Pour Bemba, il est impératif que la lumière soit faite sur ces collusions afin de restaurer l’intégrité des institutions militaires et de tourner définitivement la page des infiltrations.
En relançant ce dossier brûlant, Jean-Pierre Bemba ne se contente pas d’une critique politique. Il cherche, selon plusieurs observateurs, à repositionner son image dans un contexte sécuritaire tendu, tout en appelant à une prise de conscience nationale sur les erreurs du passé.