Kinshasa, 16 mai 2025 – Alors que le spectre d’une levée d’immunité judiciaire plane sur Joseph Kabila, ancien chef de l’État et sénateur à vie, le Sénat congolais a opté pour la prudence en mettant en place une Commission spéciale chargée d’examiner le réquisitoire de l’auditeur général des FARDC. Cette décision, prise à huis clos ce jeudi au Palais du Peuple, marque un tournant dans cette affaire explosive aux multiples rebondissements.
Composée de sénateurs de différentes sensibilités politiques, la Commission dispose de 72 heures pour soumettre son rapport. Toutefois, les avis sont déjà très partagés au sein de la chambre haute. Si certains soutiennent ouvertement la levée de l’immunité de l’ex-président, d’autres appellent au respect strict de la procédure, rappelant l’obligation d’un vote du Congrès, tel que stipulé à l’article 224 du règlement intérieur du Sénat.
Ce bras de fer institutionnel intervient dans un contexte marqué par de graves accusations portées contre Joseph Kabila, notamment trahison, crimes de guerre et crimes contre l’humanité, en lien avec les violences dans l’Est du pays. Des accusations graves que le ministre de la Justice, Constant Mutamba, dit étayer par un « maximum de preuves », pointant une implication directe dans l’agression attribuée au Rwanda via le M23.
Mais cette démarche, présentée comme une quête de justice par ses initiateurs, est perçue autrement par une partie de l’opinion. Des voix s’élèvent pour dénoncer ce qu’ils considèrent comme une instrumentalisation politique de la justice. La loi n°18/021, portant statut des anciens présidents élus, est au cœur des arguments de ceux qui dénoncent une violation des droits constitutionnels de Joseph Kabila.
Parmi les soutiens les plus fermes de l’ancien président, Patrick Nkanga, cadre du PPRD, n’a pas mâché ses mots. Dans une déclaration publiée sur son compte X, il a dénoncé une « attitude antidémocratique » à l’égard de Joseph Kabila, qu’il qualifie de « traumatisme pour l’avenir de notre démocratie » et un « signal malheureux pour la démocratie en Afrique ».
Alors que l’opinion publique reste divisée, tous les regards sont désormais tournés vers la Commission spéciale et ses conclusions. Sa mission, aussi technique que politique, pourrait redessiner les rapports de force au sommet de l’État, et raviver des tensions enfouies au sein de la classe politique congolaise.