Kinshasa, 20 juin 2025 — Le Dr Denis Mukwege, lauréat du prix Nobel de la paix, a réagi ce jeudi à la récente déclaration conjointe signée à Washington entre la République démocratique du Congo et le Rwanda. Cette initiative, menée sous la médiation des États-Unis et avec le soutien du Qatar, suscite chez le célèbre gynécologue de Panzi de vives inquiétudes.
Dans un document de trois pages, Mukwege met en garde contre un accord jugé opaque, non inclusif et privé de garanties judiciaires solides. À ses yeux, ce texte, loin d’instaurer une paix véritable, pourrait plutôt légitimer l’agression militaire et le pillage systématique des ressources congolaises.
S’il salue les efforts diplomatiques en faveur d’une désescalade, Mukwege critique fermement le manque de contenu structuré dans la déclaration du 18 juin. Celle-ci, selon lui, ne propose ni calendrier clair, ni mécanismes de mise en œuvre vérifiables. Il regrette surtout l’absence de toute mention explicite de l’agression rwandaise, ainsi que le silence troublant sur les crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis dans l’Est de la RDC.
Autre reproche majeur est que l’accord ne fait aucune référence à la résolution 2773 du Conseil de sécurité des Nations unies. Celle-ci appelle pourtant à un cessez-le-feu immédiat, au retrait des troupes rwandaises, et au démantèlement des structures administratives illégales dans les zones sous occupation.
Pour Mukwege, seule une approche multilatérale, inclusive et fondée sur la justice pourra réellement poser les bases d’une paix durable. Il insiste sur la participation des femmes et des jeunes dans les négociations, tout en martelant : “La paix ne se résume pas à faire taire les armes ou à conclure des accords économiques. Elle doit passer par la justice et la réparation des victimes.”
Le célèbre médecin met enfin en garde : un accord qui ignore les victimes et occulte les responsabilités ne fera que repousser les violences à plus tard. Il appelle à la relance de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba de 2013, et à l’organisation d’une conférence internationale de haut niveau pour restaurer une paix équitable dans la région des Grands Lacs.