Kinshasa, 12 juin 2025- Cela fait exactement trois ans que la cité frontalière de Bunagana, dans le territoire de Rutshuru, est tombée aux mains des rebelles du M23, soutenus par le Rwanda. Le 13 juin 2022, cette localité, située à une centaine de kilomètres au nord de Goma, était conquise à la reprise de la rébellion. Aujourd’hui, alors que l’occupation se prolonge, le prix Nobel de la paix, Denis Mukwege, tire une nouvelle fois la sonnette d’alarme.
Dans une déclaration publiée ce jeudi, le célèbre gynécologue dénonce une triple violation de la République démocratique du Congo. “Cela fait 3 ans que la souveraineté nationale et l’intégrité territoriale de la République Démocratique du Congo sont violées par le Rwanda, qui méprise avec arrogance les principes de base de la charte des Nations Unies pour imposer ses ambitions expansionnistes et piller à grande échelle les minerais stratégiques congolais, dans l’indifférence complice de la communauté internationale”, écrit-il.
Mukwege s’inquiète aussi du sort des populations locales, restées piégées sous le joug d’un pouvoir armé. Pour lui, ces trois années d’occupation représentent également trois années de souffrances inouïes infligées aux Congolais de Bunagana et des zones environnantes, livrés à « un régime d’exploitation et de prédation à l’origine des graves violations des droits humains et du droit international humanitaire commises en totale impunité ».
Mais au-delà de la dénonciation, Mukwege pointe la responsabilité directe des autorités nationales dans cette situation prolongée. Il considère qu’un manque criant de volonté politique à Kinshasa empêche toute réforme en profondeur du secteur sécuritaire. Il regrette également l’absence d’une stratégie globale de justice transitionnelle et de nettoyage de l’administration publique. Ces carences auraient, selon lui, favorisé la détérioration du climat sécuritaire.
L’occupation de Bunagana n’a pas été un fait isolé. Après la prise de cette cité stratégique, les rebelles ont poursuivi leur avancée, occupant une série de villages avant d’atteindre Goma en janvier 2025. Le mouvement s’est ensuite étendu jusqu’au Sud-Kivu, où ils contrôlent désormais plusieurs entités, y compris la ville de Bukavu.